Comment protéger son conjoint ?

Charlie Cailloux
Mis à jour par Charlie Cailloux
le 21 novembre 2017
Juriste chez PAP.fr

Le conjoint a longtemps été oublié des successions. Ni héritier réservataire, ni même héritier privilégié, il n'avait aucune priorité sur le patrimoine de son époux. Aujourd'hui, la loi protège le conjoint. Toutefois, il est toujours possible d'améliorer la situation de l'époux.

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Depuis 2002, un régime légal de protection du conjoint est instauré. Ainsi, celui-ci bénéficie au moins d'un quart de la succession en pleine propriété.

La loi protège également le logement familial et confère au conjoint survivant un droit de jouissance du logement familial pendant une durée d'un an. Sur option, ce droit temporaire peut être converti en un droit viager d'habitation et d'usage.

En outre, par l'intermédiaire du contrat de mariage que les époux ont signé, le conjoint survivant bénéficiera ou non de la communauté de biens que les époux ont acquis pendant le mariage. Les époux peuvent à tout moment changer de régime matrimonial ou y insérer des clauses d'attribution ou de partage.

Enfin, il est possible de protéger votre conjoint par l'intermédiaire de donations, d'un testament ou d'une assurance-vie.

Le droit sur le logement pour le conjoint survivant

Le droit de jouissance gratuit et temporaire bénéficie aux couples mariés locataires ou propriétaires de leur logement. Le droit d'habitation et d'usage ne concerne que les couples propriétaires.

Le droit de jouissance gratuit et temporaire

Le conjoint survivant a la certitude de conserver la jouissance gratuite du logement conjugal et du mobilier durant un an à compter du décès de son époux (art. 763 du Code civil).

Bon à savoir : ce droit est également reconnu au partenaire survivant pacsé.

Les conditions

Le conjoint survivant bénéficie automatiquement de ce droit, il n'a pas à en faire la demande.

En outre, il bénéficie du droit de se maintenir dans les lieux que le logement fût la propriété des deux époux ou la propriété exclusive du défunt.

Et si les époux sont locataires...

Si le logement était loué par le couple, le conjoint survivant se maintient dans les lieux et sera remboursé par la succession au fur et à mesure qu'il s'acquitte des loyers. Les loyers, hors charges, sont alors prélevés sur le montant de la succession (Rép. min. Morange Ass. Nat. du 11 janvier 2005).

L'option pour un droit viager d'habitation et d'usage

Lorsque le logement était la propriété des deux époux ou la propriété exclusive du défunt, le conjoint survivant peut bénéficier, jusqu'à son décès, d'un droit d'habitation sur le logement et d'un droit d'usage sur les meubles qui le garnissent (art. 764 du Code civil). Ces droits sont viagers, c'est-à-dire qu'ils s'éteignent avec le décès de l'époux veuf.

Conditions pour bénéficier de l'option

Le conjoint survivant dispose d'un délai d'un an à compter du décès, pendant qu'il bénéficie du droit de jouissance temporaire, pour manifester sa volonté de bénéficier de son droit d'habitation et d'usage.

Ces droits viagers portent sur les mêmes biens que le droit temporaire de jouissance. Cependant, si le logement était détenu par le défunt en indivision avec un tiers (ce peut être le cas à la suite d'un deuxième mariage), le conjoint survivant est privé de ces droits.

À savoir : le défunt, contrairement au droit de jouissance temporaire, a pu écarter ou limiter le droit d'usage et d'habitation de son conjoint, à la seule condition de l'avoir fait aux termes d'un testament authentique (rédigé devant notaire).

Les droits d'habitation et d'usage demeurent pendant toute la vie du conjoint survivant, même en cas de remariage.

Une fois l'option prise, le conjoint survivant ne peut ni céder ni louer les droits qui lui sont conférés. Le droit d'habitation et d'usage n'est pas gratuit. Le conjoint survivant doit s'acquitter des charges et réparations d'entretien du logement, ainsi que de la taxe d'habitation.

Dédommagement ou complément

La valeur des droits d'habitation et d'usage s'impute sur les droits successoraux du conjoint survivant. Deux cas de figure peuvent se présenter.

  • soit la valeur du droit est inférieure à sa part d'héritage, et dans ce cas, il aura droit au complément sur les biens existants ;
  • soit la valeur du droit d'habitation est supérieure à la part successorale du survivant. Dans ce cas, il n'a pas à dédommager les autres héritiers, même si leur part réservataire est entamée.

Priorité sur le logement lors du partage de la succession

Si le conjoint survivant reçoit une quotité de la succession en pleine propriété lors de la succession, il aura la priorité dans le partage de l'indivision pour l'attribution du logement familial mais aussi de l'ensemble du mobilier (art. 831-2 du Code civil).

Si la quotité reçue est inférieure au montant du logement, le conjoint survivant devra verser la différence, appelée soulte, à la succession. Il bénéficie dans ce cas de délais de paiement spéciaux (jusqu'à 10 ans).

L'organisation volontaire de la protection de l'époux survivant

Protéger son conjoint est une préoccupation essentielle du couple. Et bien souvent, cette idée devient prioritaire l'âge venant. Il est toujours possible d'améliorer les droits de l'époux survivant en dehors du contrat de mariage.

La donation au dernier vivant

La donation au dernier vivant permet au conjoint survivant de recevoir une part plus importante que ce que la loi lui accorde. Ainsi, il est possible, s'il n'existe pas d'héritier réservataire, de recueillir tous les biens de son conjoint ou, en présence de descendants, de laisser le choix au survivant de recevoir sur option ce qui lui convient le mieux au moment du décès, à savoir :

  • soit l'usufruit de toute la succession ;
  • soit les 3/4 en usufruit et 1/4 en propriété ;
  • soit la quotité disponible (1/2, 1/3 ou 1/4 selon le nombre d'enfants).

Le choix que fait le survivant dépend évidemment de sa situation au moment du décès. La plupart du temps, le survivant opte pour la totalité en usufruit. Ainsi, il peut continuer à habiter le logement conjugal, profiter des revenus des placements, etc. Vous l'aurez donc compris, ce choix doit être mûrement réfléchi, en fonction de l'âge du conjoint et du nombre éventuel d'enfants.

Enfin, cet acte doit être obligatoirement fait devant notaire. Il faut compter environ 250 € pour l'établissement des donations réciproques (l'époux donne à l'épouse et vice versa).

Depuis le 1er janvier 2005, le caractère révocable des donations entre époux de biens présents est supprimé (sont visées toutes les donations dont le terme est le décès du donateur).

Etant donné que la modification de ce barème peut se révéler pénalisante lors des transmissions d'usufruit, les actes portant changement de régime matrimonial en vue de l'adoption d'un régime communautaire passés entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2005 sont exonérés de droits (art. 19 al. 5 du CGI rajoutant un article 1133 bis).

Par testament

Le testament est un moyen de régler la transmission de ses biens après sa mort. Faire un testament c'est indiquer « noir sur blanc » ce que l'on souhaite donner à son époux. Il en existe trois formes : olographe, authentique et mystique.

Le testament olographe est la forme la plus utilisée. Il est rédigé à la main, daté et signé par le défunt. Le testament mystique peut être rédigé soit par écrit soit à la machine et il est ensuite remis à un notaire en présence de deux témoins. Quant au testament notarié, dit aussi authentique, c'est un acte reçu par un ou deux notaires assistés de deux témoins.

Ne perdez pas de vue qu'un conjoint ne peut pas attribuer à son époux plus que la quotité disponible (sauf s'il n'existe aucun enfant).

L'assurance vie

L'assurance vie permet au souscripteur de désigner son conjoint comme bénéficiaire. La somme figurant au contrat au jour du décès du souscripteur reviendra au bénéficiaire.

Depuis le 18 décembre 2007, le bénéficiaire qui souhaite accepter le contrat d'assurance-vie doit obtenir l'accord du souscripteur. Tant qu'il n'a pas accepté, le souscripteur peut changer de bénéficiaire.

Les avantages matrimoniaux

Pour protéger au mieux votre conjoint, la première initiative est de vérifier sous quel régime matrimonial est régi votre mariage. Vous pouvez changer de régime matrimonial ou simplement y ajouter des clauses.

Vous êtes sous un régime communautaire

Du point de vue de la protection du conjoint survivant, les régimes communautaires sont à privilégier. En effet, l'objectif de ces régimes est de faire profiter les deux époux de l'enrichissement du mariage.

Outre le régime légal de la communauté réduite aux acquêts, le Code civil permet d'adopter des régimes de communauté encore plus protecteurs.

La clause de préciput

Intégrée au contrat de mariage, la clause de préciput permet au conjoint de recueillir une somme d'argent ou un bien précis (compris dans la communauté) avant un partage avec les différents héritiers.

Les clauses de partage inégal ou d'attribution intégrale

Le régime légal de communauté prévoit, au moment du décès d'un époux, le partage de la communauté par moitié. Une moitié revient au conjoint survivant, la seconde entre dans le patrimoine du défunt à partager.

Une clause du contrat de mariage peut accorder davantage à l'époux : les deux tiers, les trois quarts ou même la totalité de la communauté. Il s'agit alors d'une clause d'attribution intégrale.

Les biens peuvent être attribués en pleine propriété ou en usufruit. L'attribution de l'usufruit permet aux enfants de récupérer la pleine propriété au décès du conjoint restant.

Régime de la communauté universelle

Au-delà des clauses, ce régime communautaire est le plus protecteur du conjoint survivant. Dans ce régime, appartiennent à la communauté des époux tous les biens meubles et immeubles, acquis avant et pendant le mariage (art. 1526 du Code civil). Au décès de l'époux, le conjoint survivant devient propriétaire de la moitié de cette communauté.

En complétant par une clause d'attribution intégrale, le conjoint devient propriétaire de l'ensemble des biens communs.

Ce régime, extrêmement protecteur du conjoint, concerne essentiellement les couples âgés et sans enfants ou dont les enfants sont déjà indépendants. Il permet également aux époux dont les écarts de richesses sont importants de lisser les inégalités. Le plus riche transfère de son patrimoine à son époux.

Vous vous êtes placés sous le régime de la séparation de biens

Dans la séparation de biens, chaque époux possède des biens personnels qu'il gère seul. A priori, il n'y a aucun bien ni dette communs. Ce régime est préférable lorsque l'un des époux exerce une activité professionnelle à risques (commerçant, profession libérale, entrepreneur individuel...) dans laquelle les créanciers professionnels peuvent poursuivre le paiement des créances sur le patrimoine personnel du débiteur, et donc sur la communauté.

Les clauses de partage inégal et de préciput peuvent également être ajoutées au contrat de mariage.

La clause de partage inégal

Par cette clause, les époux peuvent prévoir que les biens indivis reviendront au conjoint survivant. Cependant, à la différence du régime communautaire, l'acte intervient en dehors du régime matrimonial et est considéré comme une donation entre époux.

Dès lors, les enfants du défunt vont pouvoir contester cette donation si elle empiète sur leurs parts réservataires et faire réduire la donation en proportion.

L'achat privilégié du logement

Dans le contrat de mariage, les époux peuvent prévoir que le conjoint survivant sera autorisé à acheter certains biens, par exemple le logement. Il devra payer le prix des biens prélevés à la succession.

Le régime légal de succession du conjoint

Selon le régime légal de succession, la communauté est divisée en deux (50/50) et une part revient à l'époux survivant. Reste alors à partager le patrimoine du défunt, composé de la moitié de la communauté et de ses biens propres.

Avant la loi de juillet 2002, le patrimoine du défunt ne revenait pas en priorité à son conjoint. En effet, ce dernier n'était ni un héritier réservataire, ni même un héritier privilégié.

Aujourd'hui, la loi confère des droits au conjoint survivant sur le patrimoine du défunt. Toutefois, pour vous assurer que votre conjoint sera à l'abri, vous pouvez organiser vous-même la protection de votre conjoint.

 Quid du conjoint en instance de divorce ?

Le conjoint engagé dans une instance en divorce ou en séparation de corps au moment du décès garde sa qualité d'héritier. Il la perd uniquement si le jugement définitif du divorce est prononcé au jour du décès et ce depuis le 1er janvier 2007.

L'étendue des droits du conjoint survivant est subordonnée à l'existence ou non d'enfants du défunt.

Le défunt a des enfants

Si tous les enfants du défunt sont ceux du couple

Si tous les enfants du défunt sont ceux du couple, le conjoint a une option. Il peut recueillir:

  • la totalité des biens de la succession en usufruit, ou,
  • le quart des biens en pleine propriété.

Si tous les enfants du défunt ne sont pas issus des deux époux

Dans l'hypothèse où l'époux décédé laisse un ou plusieurs enfants qui ne sont pas communs aux deux époux, le conjoint n'a pas d'option et on lui attribue le quart des biens en pleine propriété.

Depuis le 1er janvier 2007 (loi du 23 juin 2006), le conjoint survivant peut renoncer à une partie de ses droits au profit de ses enfants ou de ses beaux-enfants.

Le défunt n'a pas d'enfants

En l'absence de descendants du défunt, le conjoint est confronté à d'autres catégories d'héritiers.

Les père et mère du défunt

Si le défunt laisse son père et sa mère, le conjoint recueille la moitié de la succession en pleine propriété et les parents un quart chacun.

Si un seul des parents du défunt est en vie, le conjoint survivant recueille les trois quarts de la succession en pleine propriété et le parent restant un quart.

Depuis le 1er janvier 2007 (loi du 23 juin 2006), le défunt en l'absence d'enfants peut priver ses propres parents. En effet, la réserve des parents est supprimée. Les époux peuvent par testament ou donation, se désigner mutuellement comme héritier de la totalité de la succession.

En l'absence des père et mère

Si le défunt n'a ni descendant, ni ascendant, le conjoint survivant recueille l'intégralité de la succession en pleine propriété et prime sur les frères et soeurs du défunt.


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