Passoire thermique : allez-vous (finalement) pouvoir louer en 2025 ?

Laurent Lamielle
Publié par Laurent Lamielle
le 13 novembre 2024
Juriste chez PAP.fr

Une proposition de loi doit permettre d’assouplir le calendrier d’interdiction de mise en location des passoires thermiques en copropriété. Des logements classés G par le DPE pourront donc finalement continuer d’être loués après le 1er janvier 2025.

La proposition de loi exclut l’application immédiate de l’interdiction de louer pour les baux en cours.
La proposition de loi exclut l’application immédiate de l’interdiction de louer pour les baux en cours. © lechatnoir/GettyImages

📌 En résumé

La loi prévoyait des restrictions strictes pour les logements classés G, mais de nombreuses dérogations permettent de les louer.

Exclusion des baux en coursL’interdiction de louer un logement G concerne seulement les nouveaux baux et les tacites reconductions dès janvier 2025.
Dérogation pour la copropriétéLes locations restent autorisées si la copropriété a voté des travaux de rénovation.
Travaux irréalisablesEn cas de contraintes architecturales ou patrimoniales, le juge ne peut ordonner des travaux d'isolation.
Sanctions pour non-respectSi le logement n’atteint pas la performance requise, le locataire peut exiger des travaux, une baisse de loyer et/ou des dommages et intérêts.

La lutte contre le dérèglement climatique a motivé la mise en place d’un seuil minimal de performance énergétique pour louer un logement ; c’est ce qu’on appelle la « décence énergétique ». Le calendrier mis en place s’avère toutefois intenable et son maintien obstiné pourrait aboutir à une catastrophe : le retrait de centaines de milliers de biens du marché locatif, aggravant ainsi une crise du logement déjà violente.

Des députés, soutenus par le gouvernement, proposent une loi pour assouplir les règles. L’idée n’est pas de supprimer l’interdiction de louer des logements indécents, ni de reporter tout le calendrier, mais de donner un sursis aux copropriétés engagées dans des travaux. La loi vise aussi à clarifier les modalités de l’interdiction de louer et les droits des locataires en situation de précarité énergétique.

La loi sur la décence énergétique en copropriété devrait être examinée en décembre pour application début 2025.

Bail en cours : pas concerné par l’interdiction

La proposition de loi écarte l'application immédiate de l'interdiction de louer aux baux en cours. L'idée est que l'interdiction de louer un logement G ne s'applique qu'aux contrats de location conclus, signés ou tacitement renouvelés à compter du 1er janvier 2025.

💡 Exemple pour la location vide

Un logement classé G par le DPE a été loué non meublé le 1er octobre 2024. Au 1er janvier 2025, le locataire ne pourra pas exiger de travaux de rénovation énergétique. Ce n'est que le 1er octobre 2027 que le logement deviendra indécent.

💡 Exemple pour la location meublée

Un logement classé G par le DPE est loué meublé le 1er décembre 2024. Au 1er janvier 2025 le locataire ne pourra pas exiger de travaux de rénovation énergétique. Ce n'est que le 1er décembre 2025 que le logement deviendra indécent.

En location meublée, le sursis sera de courte durée puisque le bail se reconduit tacitement chaque année.

📆 Dates d’interdiction de location des passoires énergétiques

L’obligation de décence énergétique sera donc réputée satisfaite quand le logement aura atteint le niveau de performance exigible à la date à laquelle le contrat de location a été conclu, reconduit ou tacitement renouvelé.

En métropole

1er janvier 2023 Interdiction de la classe G+*
1er janvier 2025 Interdiction de la classe G
1er janvier 2028 Interdiction de la classe F
1er janvier 2034 Interdiction de la classe E

*Les logements « G+ » consomment ≥ 450 kWh/m²/an en énergie finale (donnée du DPE).

Outre-mer

1er janvier 2028 Interdiction de la classe G
1er janvier 2031 Interdiction de la classe F

Les meublés de tourisme devraient être rattrapés par le DPE et la décence énergétique en 2025.

Un sursis pour les copropriétés engagées dans des travaux

La proposition de loi se veut pragmatique ; il serait contre-productif de pénaliser un bailleur alors que la copropriété est vertueuse. En conséquence, l’obligation de décence énergétique sera suspendue le temps de la réalisation des travaux lorsque ces derniers ont été votés par la copropriété. Le copropriétaire devra donc bien s'assurer que le vote des travaux a bien eu lieu avant de relouer un logement classé G après le 1er janvier 2025.

Exemple de sursis à l'interdiction de louer en copropriété

Vote des travaux La copropriété vote des travaux de rénovation énergétique au printemps 2025.
Location autorisée Le copropriétaire d’un logement classé G peut le louer à l’été 2025 sans être tenu de faire des travaux immédiats.
Absence de contrainte Le locataire ne pourra pas exiger la réalisation immédiate des travaux si un plan de rénovation est en cours.

❌ Pas de sursis pour la maison individuelle !

La proposition de loi n'évoque pas la maison individuelle ; un propriétaire devra donc ne pas remettre en location sa maison après le 1er janvier 2025 si celle-ci est classée G. Seules échappatoires : des contraintes patrimoniales ou architecturales qui interdisent les travaux, ce qui sera très rare en pratique.

Cette inégalité de traitement peut être justifiée par l'absence de la complexité juridique et technique liée à la copropriété. Reste que sans sursis pour les propriétaires de bonne volonté, ce sont beaucoup de maisons qui risquent de sortir du marché locatif...

Blocage dans la copropriété : toujours un motif de dérogation en 2025 ?

Aujourd'hui la loi prévoit qu'un copropriétaire peut continuer à louer une passoire énergétique s'il prouve cumulativement :

  • que malgré ses diligences constantes, la copropriété s'est opposée aux travaux sur les parties communes ;
  • qu'il a réalisé dans le logement tous les travaux privatifs possibles.

Curieusement, à ce stade, la proposition de loi semble ne plus considérer le blocage de la copropriété comme un moyen d'échapper à l'interdiction de louer. Toutefois, dans une interview du 13 novembre 2024, le député qui porte la réforme, Bastien Marchive (Ensemble pour la République), a déclaré qu'en cas de refus de l'assemblée générale de copropriété, l'interdiction de location ne s'appliquerait pas. Espérons que les débats clarifieront ce point !

Pas d'interdiction de louer si le locataire refuse les travaux

La loi précise qu’un locataire ne pourra pas invoquer le non-respect de la décence énergétique d’un logement s’il empêche la réalisation des travaux permettant de l’atteindre. En d’autres termes, il ne pourra pas réclamer des améliorations tout en bloquant les interventions nécessaires.

Certains diront qu’il s’agit d’un nouvel exemple de « loi bavarde », car la législation actuelle impose déjà au locataire de permettre l’accès au logement pour les travaux, notamment ceux d’économie d’énergie. En effet, le locataire peut déjà être contraint, sous astreinte, de laisser procéder aux travaux, et une rupture de bail peut même être demandée en justice en cas de refus.

Travaux irréalisables : possible de louer

La proposition de loi rappelle que l'interdiction de louer ne s'applique pas dans deux hypothèses :

1️⃣ Le logement est soumis à des contraintes architecturales

C'est l'hypothèse dans laquelle les travaux nécessaires feraient courir un risque de pathologie du bâti, affectant notamment les structures ou le clos et couvert des bâtiments. Cette situation devra être attestée par une note argumentée rédigée, sous sa responsabilité, par un homme de l'art.

2️⃣ Le logement est soumis à des contraintes patrimoniales

C'est l'hypothèse dans laquelle les travaux nécessaires porteraient trop atteinte à l'esthétique du bâtiment, par exemple en modifiant l'état des parties extérieures, l'état des éléments d'architecture et de décoration de la construction. Cette situation sera attestée par un refus d'autorisation de travaux délivré par la mairie et/ou l'architecte des Bâtiments de France.

En cas de contraintes architecturales ou patrimoniales, le juge ne pourra pas imposer de travaux pour améliorer la performance énergétique.

Des travaux trop coûteux permettront-ils d'échapper à l'interdiction de louer ?

Une incertitude demeure quant au coût des travaux : peut-il à lui seul, s'il est exorbitant, faire échapper les propriétaires bailleurs à l'interdiction d'un logement qui ne respecte pas la décence énergétique ? La loi actuelle le mentionne (article L173-2 du Code de la construction et de l'habitation), mais pas de manière spécifique pour la location et ce sujet n'est pas évoqué dans la proposition de loi. Espérons que les débats permettront de clarifier ce point !

👉 Le coût des travaux est jugé disproportionné s’il dépasse 50 % de la valeur vénale du bien, estimée par un professionnel.

Quelles sanctions pour non-respect de la décence énergétique ?

Si le logement ne respecte pas les normes énergétiques (au moins classe F dès janvier 2025), le bail reste valide, permettant au locataire de rester. Cependant, le locataire peut exiger des travaux de rénovation pour mise en conformité. En cas de refus, il peut saisir la commission de conciliation puis, si nécessaire, le tribunal, où le juge pourra :

  • ordonner des travaux, sauf en cas de contraintes architecturales/patrimoniales ou si la copropriété a voté des travaux ;
  • réduire le loyer ou suspendre son paiement jusqu’aux travaux ;
  • imposer des dommages et intérêts au propriétaire.

Le locataire pourra obtenir une baisse de loyer même si le propriétaire n’est pas contraint d’effectuer les travaux, afin de protéger les droits des locataires en situation de précarité énergétique.

👉 En raison de la gravité des sanctions, on utilise l'expression « interdiction de louer » ; il s'agit d'une exagération puisque la mise en location reste possible, mais elle expose le propriétaire bailleur à un recours du locataire.

🤳Pour en savoir plus, regardez notre vidéo

Sources :

  • Proposition de loi visant à prévenir les litiges relatifs aux obligations de décence énergétique et à sécuriser leur application en copropriété ;
  • Article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs ;
  • Article 20-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs ;
  • Articles 3 bis et 3 ter du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent ;
  • Article L173-2 du Code de la construction et de l'habitation ;
  • Proposition de loi sur les passoires thermiques : "Le locataire pourra faire un recours contre son propriétaire pour diminuer son loyer", assure le député Bastien Marchive, francetvinfo.fr, 13 novembre 2024.

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