La cohabitation intergénérationnelle : un modèle de solidarité

Cécile Nlend
Mis à jour par
le 2 octobre 2020
Juriste chez PAP.fr

La cohabitation intergénérationnelle met l'accent sur la solidarité entre deux générations: des séniors esseulés et des jeunes en mal de solution de logement abordable.

La cohabitation intergénérationnelle: un modèle de solidarité
La cohabitation intergénérationnelle: un modèle de solidarité © Maskot/Getty Images

La cohabitation intergénérationnelle n'est pas un concept nouveau. Ce mode de location s'est développé depuis quelques années sous l'impulsion d'associations soucieuses de mettre en relation deux générations : d'un côté des personnes âgées esseulées, de l'autre des jeunes en mal de logement. L'idée était de faire jouer la solidarité dans les deux sens.

Des associations proposaient des modèles de contrat, couplés de chartes de bonnes pratiques. Le système n'était cependant pas encadré par un texte de loi et était source d'insécurité juridique pour ceux qui y avaient recours (risque de requalification en contrat de travail, en bail d'habitation, etc.).

La loi Elan du 23 novembre 2018 est venue apporter le cadre légal qui faisait défaut et l'arrêté du 30 janvier 2020 a instauré une charte qui réglemente ce type de contrat.

Que recouvre la cohabitation intergénérationnelle solidaire ?

Elle est définie par l'article L 118-1 du Code de l'action sociale et des familles comme un système qui  « permet à des personnes de soixante ans et plus de louer ou de sous-louer à des personnes de moins de trente ans une partie du logement dont elles sont propriétaires ou locataires dans le respect des conditions fixées par le contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire prévu à l'article L. 631-17 du Code de la construction et de l'habitation, afin de renforcer le lien social et de faciliter l'accès à un logement pour les personnes de moins de trente ans ».

La cohabitation intergénérationnelle vise donc  les séniors propriétaires ou locataires qui pourront louer ou sous-louer une partie de leur logement à des jeunes en échange d'un loyer modeste.

Pour proposer un contrat de cohabitation intergénérationnelle, les séniors doivent se rapprocher de structures ou associations dont l'objectif est la mise en relation de personnes et de jeunes. Ces structures doivent avoir adhéré à la Charte de la cohabitation intergénérationnelle solidaire. Elles doivent s'assurer que les parties (séniors et jeunes) en respectent bien les termes.

Ces organismes échappent à la qualification d'agent immobilier telle que définie par la Loi Hoguet du 2 janvier 1970.

Pour quels logements ?

Le sénior peut être propriétaire de son logement ou locataire. Lorsqu'il est locataire, le logement peut aussi bien être du parc social que privé. Dans les deux cas, les séniors qui souhaitent proposer une partie de leur logement en cohabitation intergénérationnelle doivent avoir informé leur bailleur au préalable de leur intention. Une fois informé, celui-ci ne peut s'opposer à la sous-location.

Les locaux mis à disposition du jeune doivent être en bon état d'usage, ne présenter aucun risque manifeste pour la sécurité physique et la santé et offrir les conditions d'hygiène et de confort exigées pour une affectation à un usage d'habitation.

Le contrat

Ce contrat n'est pas régi par la loi du 6 juillet 1989.

Il est recommandé d'avoir recours à un contrat écrit. Ce contrat doit comporter des éléments essentiels tels que :

  • la désignation précise des locaux privatifs loués ou sous-loués au jeune avec l'indication de leur surface ;
  • la désignation des locaux communs, leur nature, leur surface ;
  • la durée et la date de prise d'effet du contrat ;
  • le montant de la contrepartie financière ;
  • le cas échéant la désignation des « menus services » et leur organisation ;
  • les obligations de chacune des parties ;
  • les modalités de fin de contrat.

Il est conseillé de procéder à un état des lieux à l'entrée et à la sortie des locaux loués ou sous-loués.

La contrepartie

La contrepartie financière est définie comme devant être modeste.

  • Dans le parc privé, elle est librement fixée entre les parties. Il n'y a donc pas un mode de calcul précis. Pour autant, il est entendu qu'elle ne peut être équivalente aux loyers pratiqués pour des logements similaires.
  • Dans le parc social, la contrepartie est calculée au prorata du loyer et des charges rapporté à la surface du local mis à la disposition du jeune.

En complément de la contrepartie financière, le jeune peut avoir à rendre des « menus services » (temps de présence, partage, etc.). Il ne doit pas y avoir de lien de subordination entre les parties et les « menus services » ne doivent pas avoir de but lucratif ou être « assimilables à une prestation régulière normalement fournie par un prestataire ou par l'emploi direct ou en mandataire d'un salarié à domicile ». En somme, le jeune ne doit pas être le substitut d'un employé de maison.

Les menus services ne doivent pas être de nature à risquer une requalification de la cohabitation intergénérationnelle en contrat de travail. Les « menus services » ne seront jamais des soins infirmiers et les activités qui s'y rattachent (toilettes, délivrance et surveillance de prise de médicaments, etc.).

Les obligations des parties

Le jeune :

  • est tenu de s'acquitter de sa contrepartie financière ;
  • d'user paisiblement des locaux ;
  • d'honorer les « menus services » selon les modalités prévues dans le contrat ;
  • de répondre à des dégradations éventuelles.

Ce n'est pas obligatoire, mais le contrat peut lui imposer de souscrire un contrat d'assurance.

Le sénior :

  • s'engage à fixer une contribution financière modeste ;
  • s'assure que les locaux sont en bon état d'usage, ne présentent aucun risque manifeste pour la sécurité physique et la santé et offrent les conditions d'hygiène et de confort exigées pour une affectation à un usage d'habitation.

Tout au long de la cohabitation :

  • il doit entretenir les locaux en l'état,
  • assurer au jeune une jouissance paisible,
  • lui apporter une garantie contre les vices et défauts.

La fin du contrat

La durée du contrat est librement convenue entre les parties. Pour mettre un terme au contrat, l'une et l'autre partie devront respecter un délai de préavis d'un mois.

Quel est le cadre fiscal pour le sénior ?

  • Le sénior qui loue ou sous-loue en vide tout ou partie de son logement à un jeune est imposable au titre des Bénéfices non commerciaux (BNC).
  • Le sénior qui loue ou sous-loue en meublé à un jeune est imposable au titre des Bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

Si les locaux loués ou sous-loués constituent une ou plusieurs pièces de son habitation principale, le sénior sera exonéré de l'impôt sur le revenu pour les produits de cette location, sous réserve que :

  • les pièces louées constituent pour le locataire ou le sous-locataire sa résidence principale (ou sa résidence temporaire dès lors qu'il justifie d'un contrat de travailleur saisonnier) ;
  • et que le prix de location n'excède pas 190 €/m²/an en Ile-de-France ou 140 €/m²/an dans les autres régions.

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