Crédit immobilier : hausse des taux confirmée en avril 2020 !

Pierre Chevillard
Mis à jour par Pierre Chevillard
le 10 avril 2020
Rédacteur en chef chez PAP.fr

Les banques encore actives sur le marché immobilier augmentent les taux de leurs prêts à l’habitat. Pourquoi cette hausse du prix du crédit ? Quelles sont les prévisions ? Quel est l’impact sur le pouvoir d’achat des acquéreurs ?

© Andreas Haertle - Fotolia.com

Crise sanitaire oblige, le marché immobilier reste en mode pause. Et pourtant, les taux des prêts immobiliers augmentent. Le courtier Vousfinancer constate qu’une quinzaine de banques ont relevé leurs tarifs en avril 2020, des progressions qui varient de 0,15 à 0,25 %. Un établissement sort du lot, avec une augmentation de 0,70 % de ses barèmes ! Même écho chez Meilleurtaux, qui observe une progression moyenne de 0,20 à 0,30 %. Et des courtiers comme Emprunt Direct, Cafpi, La Centrale de Financement ou encore Empruntis observent la même tendance. 

La hausse des taux en chiffres. Sur vingt ans, la moyenne tourne autour de 1,40 % brut (hors assurance) au 10 avril 2020. C’est peu ou prou le même niveau qu’au 2 avril. Mais la hausse se ressent surtout sur les taux plancher. En une semaine, le vingt ans brut minimum passe de 0,90 à 1,10 %. Même évolution pour les taux plafond. Le vingt ans brut maximum est actuellement à 2,00 %, contre 1,95 % il y a huit jours. Bref, les écarts de taux se resserrent et les décotes, lorsqu’elles sont accordées, sont plus modérées. 

Des conséquences limitées. Une bonne nouvelle toutefois : la hausse reste modérée et impacte peu le pouvoir d'achat immobilier. En avril 2020, pour 1 000 € par mois, on emprunte 209 222 € et l'on paye 30 778 € d’intérêts. En octobre 2019, date du record absolu à la baisse, le 20 ans brut moyen tombait à 1,10%. Pour une même mensualité de 1 000 €, le capital montait à 215 346 € pour 24 654 € d’intérêts (données brutes fournies à titre indicatif, sans prise en compte des autres critères comme le reste à vivre).

Augmentation générale ? Et puis les chiffres d’avril 2020 « doivent être pris avec prudence car nous n'avons pas reçu l'ensemble des barèmes et de grandes banques sont aujourd'hui en production restreinte et donc ne communiquent pas sur leurs taux de crédit immobilier », explique Maël Bernier, directrice de la communication de Meilleurtaux.com. Pour la majorité des banques, l’heure est au traitement des dossiers en cours et elles ne prennent plus, sauf exception, les nouvelles demandes. 

   Taux brut moyen  Taux brut minimum  Taux brut maximum
Durée : 7 ans  0,90%  0,40%  1,80%
Durée : 10 ans  1,00%  0,65%  1,80%
Durée : 15 ans  1,20%  0,90%  1,80%
Durée : 20 ans  1,40%  1,10%  2,00%
Durée : 25 ans  1,60%  1,45%  2,35%

Les taux immobiliers au 10 avril 2020. Taux donnés à titre indicatif (sources : Emprunt Direct, Empruntis, Meilleurtaux, Vousfinancer). Par rapport au 2 avril 2020, la hausse est sensible sur les planchers et les plafonds. Ainsi, certains prêts se rapprochent du taux de l’usure (niveau que le Taux annuel effectif global d’un crédit immobilier ne peut légalement pas dépasser). Pour les emprunteurs dont les taux sont en général plus élevés (primo-accédants modestes, emprunteurs à risques qui paient une assurance plus chère notamment), la hausse des maximums peut aboutir au dépassement du taux de l’usure, donc au refus de prêt. 

Taux immobiliers : les raisons de la hausse 

Moins de concurrence bancaire. Pourquoi les taux remontent-ils? « L’augmentation d’avril 2020 s’explique par une moindre pression concurrentielle sur le crédit immobilier, segment délaissé par une majeure partie de banques en ce temps de crise majeure » répond Alban Lacondemine, président d’Emprunt Direct. L’an dernier, les banques s’arrachaient les emprunteurs à grands renforts de décotes sur les barèmes, ce qui poussait les taux de crédit immobilier à la baisse.

Prêteurs cherchent marges. Autre explication : « les banques anticipent une dégradation des conditions de refinancement et souhaitent reconstituer leurs marges », note Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinancer. Selon le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF), elles ne gagnent plus d’argent sur le crédit immobilier depuis 2016, ce qui les fragilise. La hausse des taux actuelle leur permet de dégager une marge plus importante, ce qui les consolide en cette période tourmentée. 

Risque de crédit. Et puis il y a les incertitudes économiques (santé des entreprises, chômage, etc.). « Pour les banques, prêter aujourd’hui présente davantage de risques, ce qu’elles compensent en augmentant leurs taux », analyse Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi. Logique : les banques raisonnent comme les investisseurs. Elles considèrent l’emprunteur comme un placement. Et plus le risque est grand, plus le rendement de ce placement (donc le taux du prêt) doit être élevé… 

Et si les taux baissaient ?

Prévisions difficiles. Quant à savoir si les taux vont monter ou baisser, l’heure  est à la prudence, surtout pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire. La semaine dernière, Ludovic Huzieux, fondateur d’Artemis Courtage, parlait de « contexte chahuté et de soubresauts à prévoir ». De fait, les facteurs de hausse comme de baisse des taux sont multiples, compliquant les pronostics. Ce n’est pas pour rien si les observateurs, notamment les courtiers, font montre d’une grande prudence. 

Facteurs de hausse. Risque persistant, banques prudentes qui souhaitent reconstituer leurs marges, anticipation de conditions de refinancement moins favorables : autant de facteurs militent pour de nouvelles hausses. Et puis les obligations assimilables du Trésor, l’un des placements préférés des banques et l’un des indicateurs d’évolution des taux, affichent de nouveau des rendements positifs, « ce qui tend à conforter cette tendance », estime Alban Lacondemine. 

Espoirs de baisse. La hausse n’est pas inéluctable. Avec l’action de la Banque centrale européenne (BCE), les banques peuvent continuer à prêter à bas taux. Autre bonne nouvelle : l’application des accords prudentiels dits Bâle 3, qui grosso modo incitent les banques à réduire le risque de crédit (donc à moins prêter), est décalée d’un an. « Ce report va permettre aux prêteurs de se concentrer sur une réponse immédiate aux conséquences du Covid-19 », se félicite Franck Roullier, directeur général d’Empruntis. 

Assouplir les critères de crédit

Critères de prêt : l’autre défi. Malgré la hausse, le financement immobilier reste bon marché (le vingt ans moyen est actuellement à 1,40 %, contre 1,10 % lors du record à la baisse d’octobre 2019). La clé, ce sont les critères d’octroi. Fin 2019, le Haut Conseil de stabilité financière demande aux banques de serrer la vis. Le taux d’effort des emprunteurs doit rester en dessous de 33 % des revenus et les crédits ne doivent plus dépasser 25 ans. Dans le même temps, les crédits sans apport disparaissent. Résultat : le nombre de prêts chute avant même le déclenchement de la crise selon l’Observatoire Crédit Logement/CSA. 

L’intérêt de tous… La relance passera davantage par un assouplissement des conditions de crédit. Les professionnels du financement demandent au HCSF d’alléger ses exigences et à la Banque de France de se montrer plus conciliante sur le taux de l’usure. Des mesures qui, en profitant aux emprunteurs, favoriseraient la reprise tout en arrangeant les banques. « Elles n'ont aucun intérêt à limiter l'accès au crédit immobilier qui représente l'un des placements les moins risqués pour elles », martèle Sylvain Levèfre, président de la Centrale de financement. 

Conseils pour bien emprunter

Comment tirer parti du contexte actuel du crédit ? Le secret c’est de bien vous préparer. Outre une bonne information, veillez à respecter les critères des banques (prêt qui ne dépasse pas 25 ans, mensualité cantonnée en dessous du tiers de vos revenus, injection d’apport personnel dans le plan de financement. Attention à la tenue de compte : les banques aiment les finances bien gérées (pas de découverts notamment). Si vos revenus baissent avec le chômage partiel, vous pouvez décaler un tant soit peu votre projet pour présenter une meilleure situation financière (c’est notamment le cas pour les indépendants). Autre conseil : montez un dossier complet pour faciliter la recherche de votre prêt.

Quel délai pour obtenir un crédit ? Lorsque vous négocierez le compromis de vente, prolongez la condition suspensive d’obtention du crédit. Habituellement, elle est fixée à 30 voire 60 jours. Passez-là à 90 jours pour tenir compte de délais bancaires qui s’allongent. Consultez votre banque (elle vous connaît ce qui peut faciliter les choses). Vous pouvez recourir aux services d’un courtier. Cet intermédiaire sait identifier les banques qui acceptent les demandes de prêt en période d’état d’urgence sanitaire. Si vous avez déjà signé et que les choses traînent, négociez une prolongation de la condition suspensive avec votre vendeur. C’est aussi son intérêt : avec une majorité d’établissements financiers qui ne prend plus de nouvelles demandes, chercher un autre acquéreur lui prendrait beaucoup de temps. 


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