Immobilier de montagne : 70 % de passoires thermiques, mais les prix s’envolent !

Roman Rainfray
Publié par Roman Rainfray
le 25 février 2025
Chargé d'études chez PAP.fr

L’endroit le plus cher de France est aussi l’endroit où se trouvent le plus de passoires thermiques. Là où l’immobilier est le plus vétuste. Cela se passe dans les stations de ski, les stations les plus chères, les plus huppées. Le prix y monte d’année en année, à l’épreuve de toute crise, jusqu’à exploser tous les compteurs. Pourquoi ?

La montagne en sursis : entre plaisir et responsabilité, quel avenir face aux défis écologiques ?
La montagne en sursis : entre plaisir et responsabilité, quel avenir face aux défis écologiques ? © elinaxx1v/Shutterstock

📌 Les infos à retenir

Notre étude réalisée à partir des données de l’Observatoire PAP et de l’ADEME met en lumière l’ampleur du phénomène des passoires thermiques dans l’immobilier de montagne.

  • 👉 Les stations de luxe surreprésentées par les passoires thermiques (jusqu’à 80 % dans certaines stations).
  • 👉 Un prix immobilier qui grimpe , dans les stations des Alpes (Tignes + 89 % sur 5 ans, Courchevel + 78 %).
  • 👉 Les tentatives législatives en inadéquation totale avec la réalité du marché.

La loi Climat a-t-elle vraiment changé la donne ?

Dans les stations de montagne, la rénovation énergétique se présente comme un défi de taille. La loi Climat et résilience (datant de 2021) a imposé un calendrier assez strict :

  • 1er janvier 2025 les logements classés G sont interdits à la location ;
  • 1er janvier 2028 les logements classés F sont interdits à la location ;
  • 1er janvier 2034 les logements classés E sont interdits à la location.

Cela sonne de prime abord comme un coup d’arrêt pour l’immobilier en altitude, où les passoires thermiques sont légion : 31 % des logements en station sont classés F ou G, soit plus du double de la moyenne nationale (15 %). Et si l'on ajoute les logements classés E, ce sont 70 % des biens qui risquent l’interdiction de location à terme.

Mais cela va plus beaucoup loin

La loi Climat est d’autant plus contraignante qu’elle concerne à la fois les propriétaires bailleurs mais également les propriétaires occupants. Tous les propriétaires sont censés réaliser des travaux de rénovation énergétique selon ce calendrier. Des travaux très coûteux.

Cela aurait dû provoquer un certain repli du marché de haute montagne, un ralentissement des transactions, une baisse des prix. Mais il n’en est rien ! L’immobilier de haute montagne se porte mieux que jamais, avec un prix qui augmente d’année en année. Au point que ce marché semble complètement autonome par rapport au marché national, où les prix ont baissé, et où les acheteurs se sont faits rares pendant deux ans.

En 2034, c’est la grande majorité de l’immobilier de ces stations qui pourraient subir l’interdiction.

Pourquoi l’immobilier de haute montagne reste si prisé ?

Malgré un parc immobilier largement inadapté aux futures normes énergétiques, les stations de ski continuent d’attirer les acheteurs. Car au-delà de la montagne, c’est un phénomène national : les stations de ski (mais aussi le littoral) attirent de plus en plus de Français, notamment depuis la pandémie.

👉 LE rêve de toutes familles aisées

De nombreuses familles de cadres, souvent urbains, investissent dans des résidences secondaires en altitude, recherchant à sécuriser leur accès à la station, pour les vacances d’hiver.

Les retraités fortunés font également partie de la demande. Ils sont peu sensibles aux fluctuations des taux d’intérêt, achetant souvent sans crédit. Résultat : alors que le reste du marché immobilier ralentit, les zones de haute montagne continuent d’attirer une clientèle prête à payer le prix fort.

👉 Une rentabilité imbattable pour la location touristique

Les investisseurs, eux, misent sur la rentabilité exceptionnelle des locations saisonnières.

  • Des loyers élevés, avec peu de contrainte : contrairement aux locations à l’année, pas d’encadrement des loyers, une fiscalité qui reste avantageuse ;
  • Des rendements boostés par le tourisme : la demande explose pendant les saisons hivernales et estivales, garantissant des revenus locatifs bien supérieurs aux locations classiques ;
  • Les logements G et F déjà en location peuvent être loués aux touristes, et ce jusqu’en 2034, où tous les logements devront être D (nouvelle loi Le Meur).

👉 La présence d’une clientèle étrangère

Russes, Britanniques, Suisses ou encore Moyen-Orientaux, ils sont nombreux à chercher un pied-à-terre dans les stations de montagne, et surtout les stations huppées.

🙋‍♀️ Résultat, les prix s’envolent et se maintiennent à des niveaux inaccessibles pour la plupart des acquéreurs français. À Courchevel 1850, par exemple, certains chalets dépassent allègrement les 30 000 €/m². Ce phénomène contribue à raréfier l’offre pour les résidents locaux et les saisonniers, accentuant la tension sur le marché immobilier.

Les stations de luxe, une avalanche de passoires ?

On remarque que les stations de ski de luxe comportent un taux de passoires encore plus élevé que le reste de l’immobilier de montagne, qui est déjà très haut. Mais cela n’empêche pas les prix de monter, encore une fois. Les stations de luxe, dans le nord des Alpes principalement, accusent des hausses de prix sans précédent.

Station Prix moyen % de passoires thermiques (F + G)
Courchevel 11 368 €/m² (+78 % en 5 ans) 37,5 %
Tignes 8 632 €/m² (+89 % en 5 ans) 34,8 %
Val-d’Isère 12 140 €/m² (+25 % en 5 ans) 25,2 %
Méribel 10 736 €/m² (+44 % en 5 ans) 31,5 %
Morzine 7 432 €/m² (+35 % en 5 ans) 39,1 %

Pour rappel, le marché de l’immobilier français a connu une baisse de prix de 4,3 % en 2 ans.

Pourquoi l’immobilier de haute montagne est-il plus énergivore ?

Ce constat, surprenant en apparence, s’explique par plusieurs facteurs :

  • L’altitude pénalise les DPE : les hivers rigoureux et la consommation énergétique élevée pour le chauffage abaissent mécaniquement la note des logements ;
  • Un bâti ancien et mal isolé : de nombreuses résidences datent des années 60-80 et n’ont jamais été rénovées ;
  • Des copropriétés figées : les rénovations énergétiques nécessitent l’accord des copropriétaires, souvent étrangers ou non-résidents à l’année, peu enclins donc à financer de lourds travaux ;
  • L’exception de la location touristique : les meublés de tourisme profitent d’une législation beaucoup plus souple en matière de DPE, encourageant les propriétaires à maintenir leurs biens dans leur état d’origine.

Loi Climat Vs Loi du marché

L’immobilier de montagne est aujourd’hui un test grandeur nature pour les politiques écologiques en matière de logement. Si les prix continuent à grimper malgré les interdictions, connues de tous depuis longtemps, cela prouve bien que la loi Climat est trop déconnectée des réalités économiques, et trop ambitieuse, pour être véritablement appliquée.

Car dans les faits, la montagne est devenue une zone trop attirante pour subir la tempérance d’une loi issue d’une pure réflexion technocratique, sans réelle consistance, sans contrainte effective, et sans prise en compte des données économiques locales et nationales. Il faut bien comprendre que :

  • Les municipalités n’ont que peu d’intérêt à durcir les règles : les maires, soucieux de préserver l’attractivité de leurs stations, risquent de ne pas appliquer toutes les mesures qui permettent de rendre plus difficile la location saisonnière, telles que prévues par la nouvelle loi Le Meur.
  • Les acheteurs des stations de ski sont moins sensibles aux DPE qu’à l’emplacement : ce qui compte, c’est avant tout la proximité des pistes et le prestige de l’adresse, non la consommation énergétique, surtout lorsqu’on y vit qu’une ou deux semaines par an.

Le travailleur saisonnier : première victime collatérale ?

Chaque hiver, les stations de ski reposent sur les travailleurs saisonniers indispensables au tourisme. Pourtant, ils peinent à se loger face à l’explosion des locations saisonnières, qui assèchent le marché locatif et font grimper les loyers. Résultat : colocations précaires, logements de fortune en camping-cars ou voitures.

Bien que protégés comme les locataires classiques et interdits de logements classés G, leur situation reste fragile. Les propriétaires privilégient les touristes, accentuant un paradoxe criant : sans saisonniers, pas de tourisme, mais sans logement, pas de saisonniers.

👉 Ajoutons l’impact écologique : remontées mécaniques énergivores, neige artificielle gourmande en eau… Une machinerie de plus en plus essentielle face au réchauffement climatique qui ne fait qu’empirer.

Conclusion

La montagne semble inarrêtable : passoires thermiques, neige en recul, consommation excessive de ressources… Tous les voyants rouges sont allumés, mais sa cote grimpe. Jusqu’à quand ? Quel avenir écologique pour ces zones ? Peut-on concilier plaisir individuel et responsabilité collective ? Faut-il un statut particulier pour préserver économie locale et enneigement artificiel à tout prix ? Un coût justifiable ? Des questions qui ne seront pas tranchées par la loi Climat, mais par une prise de conscience collective… si elle a lieu.

Données issues de l'Observatoire PAP et de l'ADEME

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